La reprise
Oula, je crois qu'il y a un peu de laisser aller sur ce blog, moi qui voulait écrire un ou deux articles par mois, je crois que j'ai quelques articles de retard.
Bon du coup, je sais pas trop par où commencer (à part par le commencement). J'ai vécu/fait pas mal de choses ici depuis mon dernier article: J'ai fait une course de radeau, j'ai été un peu au Sénégal, le chantier a repris, j'ai été au nord du pays à Nouadhibou, j'ai vécu un ramadan et pris du poids, j'ai survécu à un hivernage (saison chaude/des pluies), j'ai préparé et couru un marathon, fait un 14 juillet dans une ambassade, fait un bal de marines américain, j'ai été aux Canaries et au Cap-Vert (enfin une seule île mais j'ai le visa alors ça compte) , j'ai aidé un apiculteur à sortir des abeilles d'une grue et on m'a collé un autre chantier en rab sur l'ambassade.
Etant venu pour travailler, je vais donc faire un article sur mon chantier, ça me semble plus approprié et ça fera croire que je fais pas que m'amuser ici.
La Reprise
Le redémarrage et l'évacuation du matériel
Ca y est, après 5 mois à rien faire et à devenir un champion sur Counter Strike et la belote en ligne (où règne pas mal de barges), l'opération pour laquelle j'ai tout quitté redémarre enfin. Cette reprise arrive après presque 2 ans d'interruption de chantier pour différentes raisons.
Comment je me suis senti le 1er jour du redémarrage
L'entreprise attributaire a donc démarré les travaux le 1er juin. Cette entreprise sénégalaise a la lourde tache de reprendre un bâtiment rempli de malfaçon et qui a été bâclé par l'entreprise précédente. Mais avant de réellement démarré, il y a eu un mois de préparation de chantier, ce mois a permis à l'entreprise de nettoyer le chantier, débroussailler (oui même dans le désert ca pousse), prendre possession des locaux et préparer les travaux.
Le chantier était avancé à environ 80% du gros oeuvre, quelques câbles électriques étaient tirés mais tout est à vérifier ou à reprendre. Je vous laisse vous replonger dans le 3ème article de ce blog pour voir vous rappeler l'avancement au redémarrage.
Pour permettre un redémarrage dans de bonnes conditions et tourner complètement la page, l'une de mes premières vraies missions a été de reprendre contact avec le mandataire de l'entreprise qui a fait faillite afin d'évacuer le matériel encore présent sur site. Et là, ca a donné lieu a des grands moments de n'importe quoi. J'ai retrouvé cette personne, pris contact avec elle et nous avons donc procéder à l'évacuation du matériel qui appartenait encore à l'entreprise. Mais l'un des problèmes est que peu avant l'abandon de l'entreprise, l'AEFE avait fait le choix d'acheter le matériel en direct via le lycée et l'entreprise n'aurait ainsi que la pose à faire, permettant ainsi de continuer le temps que celle-ci soit de nouveau opérationnelle et reprenne du poil de la bête. Cette méthode avait déjà été utilisée par le passé dans des conditions identiques sur d'autres opérations.
Mais là non, créant une double liste, l'une avec le matériel et matériaux appartenant à l'entreprise et l'autre appartenant au lycée. Du coup, au lieu que l'entreprise évacue son matériel sagement et laisse la place, je dois vérifier que celle-ci ne me tire pas le matériel qui ne lui appartient pas.
Deuxième problème, l'entreprise a des dettes dans le pays, ces dettes sont au tribunal et le matériel a été saisi par la justice mauritanienne, ce qui les a empêché de saisir le matériel (hormis qu'ils n'ont pas la place de le stocker et le manque de moyens) mais qui a également empêché les créanciers de se servir sur place (méthode courante ici), le lycée est sur la parcelle de l'ambassade de France, du coup l'Etat mauritanien ne veut pas faire de vagues. Sympa le contexte de reprise
Et dès la 1ère réunion sur site je comprends que ca va être sport, le responsable a une 60aine d'année et va clairement essayer de me la faire à l'envers, moi le petit jeune blanc...
Au final, il essaye de m'infantiliser en prenant pendant 1h des arguments qu'un enfant de 6 ans pourrait comprendre, et oui étant jeune je ne peux pas tout comprendre. C'est le festival et le ton monte (oui oui je vous jure) et je me fais un peu défoncer sur des arguments juridiques ou des documents que je ne connais pas et en montant la voix mais il ressort sans matériel et je le fais baisser d'un ton trsè rapidement (non mais oh), on finit donc sur un round nul pour le 1er tour mais c'est que le début.
Le lendemain, 2ème round, entre temps j'ai retrouvé mes billes et je suis armé, prêt. Ca tombe bien lui aussi, il attaque tout de suite en réclamant une compensation financière pour l'évacuation du matériel et il est même prêt à nous faire une fleur et nous revendre le matériel présent sur site. Bin voyons, comme disait Audiard "Un con ca ose tout c'est même à ca qu'on les reconnait". Il faut savoir que l'entreprise Palm doit environ 950k€ à l'AEFE/lycée du fait des travaux de reprises et des travaux annexes liés à la faillite, en comptant la caution bancaire qui a disparu et lui nous propose de racheter son matos pourri. Malheureusement, j'avais pas envie de rigoler et je voulais absolument rien lacher donc je l'ai renvoyé dans les cordes assez rapidement. 2ème Round Guillaume
Moi, avant le 2ème round
Aux termes de nombreux entrevus, nous trouvons un accord pour le matériel appartenant à l'ancienne entreprise que nous ne souhaitons pas garder. L'évacuation débute sans trop de soucis. Jusqu'au jour où il a essayé de prendre le matériel qui ne lui appartenait pas. Et là je crois qu'en terme de mauvaise foi, j'ai eu droit à un vrai champion, je me souviens très bien de la conversation, je vous préviens ca vole haut:
_M.Guillaume (oui tout le monde m'appelle comme ca ici), nous pouvons donc prendre ce matériel puisqu'il appartient à Palm
_ Non monsieur F, on en a déjà parlé ce matériel appartient à l'AEFE, nous l'avons acheté
_ Vous pouvez le prouver? Vous avez les factures ou preuves d'achat
_ Oui, les voici, vous pouvez voir que le lycée français et le destinataire et le payeur, Palm n'est mélé en rien
_ Oui mais ce matériel appartient quand même à Palm
_ Non arrêter, on en a déjà parler, ca va encore m'énerver.
Je redescend en température et lui sort un argument qu'un gamin de 5 ans pourrait comprendre:
_ Bon monsieur F, on va prendre un exemple simple; on va au marché ensemble, vous êtes mon restaurateur, j'achète une mangue, je la paye au vendeur de fruit à qui va t'il tendre le fruit
_ A vous
_ On est d'accord et donc la mangue appartient à qui?
_ A moi (après quelques hésitations), c'est moi qui vais la transformer
J'avoue qu'à ce moment je me suis demandé si j'étais filmé...
_ Non elle est à moi, elle sera à vous si je vous la donne mais au moment de l'addition je vous la payerai pas, je vous payerai la transformation du fruit
Après quelques secondes de réflexion
_ Oui, c'est vrai mais prenons autre chose ca va pas comme ca, prenons de la viande à la place de la mangue...
HEINNNNNNN!!!! J'ai vraiment cru être sur une autre planète à ce moment là. Au final, après plusieurs fritages où j'ai fini par croire qu'il aimait se faire humilier, il a fait évacué tout le matériel présent sur site, seules les grues et les bétonnières étaient encore sur site.
Je crois que pour les grues, j'ai eu une équipe de champions. Ils ont failli me renverser une grue, en ont ensablé une (oui oui je jure), ont pété des cadres de fenêtres et m'ont arraché le portail d'accès, plusieurs fois...
Au passage, l'une des grues avait un nid d'abeille dans une des poulies, par chance, un prof est apiculteur et a essayé de récupérer la reine pour que les autres suivent, j'ai pu l'assister, équiper de la tenue de combat, j'ai eu l'impression d'être un cosmonaute mais c'était assez drole à faire. Bon au final on a rien choppé et ca a été un échec, en 2 ans, elle avaient eu le temps de s'aménager une ruche sympa...
Petit idée de l'évacuation:
La reprise en main du chantier:
Comme je l'ai écris plus haut, l'entreprise arrive après quasiment 2 ans d'interruption de chantier, imaginez ne serait-ce que la poussière la crasse qu'il pouvait y avoir sur le site...
Ce chantier a quelques spécificités tel que:
_ être sur un site d'ambassade et par conséquent, le site est survéillé par un gardien h24, tous les ouvriers sont contrôlés à l'entrée via une liste de présence et en sortant ils sont recontrolés avec un détecteur de métaux quant ils ont des sacs (pour éviter les vols)
_ être en site occupé, tous les travaux qui doivent se faire dans le lycée actuel peuvent se faire que pendant les vacances ce qui veut dire pendant les 2 mois d'été et les petites vacances
_ avoir trois bâtiments différents à des stades d'avancement différents
_ être entreprise Tout Corps d'Etat avec un sous-traitant local qui lui fourni l'appui administratif et logistique (main d'oeuvre et petit matériel)
Tout ca fonctionnait très bien les premiers mois, le temps que chacun fasse ressortir sa vrai nature. Et, selon moi, l'entreprise a commis quelques négligences lors de sa réponse: la quantité de choses à reprendre, en effet des parties ont été sous-chiffrés et par conséquent elle doit reprendre plus de choses que ce qu'elle pensait, la qualité de la main-d'oeuvre local qui est très faible et composé de journalier qui ne viennent parfois que pour quelques jours, le temps d'avoir un peu d'argent ou trouver un chantier plus rémunérateur. Et l'un des points qui m'a le plus choqué est le problème raciale. En effet, le pays est tenu par les maures blanc qui ont pour habitudes d'utiliser les sénégalais comme homme à tout faire, pour les autres ethnies c'est un peu le cas mais moins. Or là on se retrouve en situation inversé où les sénégalais donnent les ordres et dirigent des maures et du coup ca coince chez certains. Résultat, le sous-traitant fait ce qu'il a envie, quand il a envie, pas forcément bien. Parfois même c'est l'ouvrier ou le chef d'équipe qui décide, il prend un ou deux gars et les met ailleurs alors qu'ils étaient occupés à autre chose, ce qui donne un nombre infini de micro-chantiers non terminés.
Du coup, vous pensez bien qu'à un moment ca a coincé. J'ai donc fait mon 1er gros scud, faisant suite à un chef d'équipe qui m'a certifié certaines choses qu'il n'a pas fait, plusieurs fois. Cette personne a été sorti du projet depuis. Ce mail a plutôt bien marché mais je suis rentré en France et tout a été réduit à néant.
Mais malgré ces soucis, ca a quand même avancé comme vous pouvez le voir.
Photo d'aout à septembre:
Depuis, il y a eu un petit recadrage de l'architecte et de mon chef qui ont remis les choses sur les bons rails et on en est là maintenant:
Promis, je ferai un article sur le meilleur du pire :)
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